Comment susciter la motivation et l’engagement des étudiants universitaires?

Dans ce billet, je présente trois mesures pour susciter la motivation et l’engagement des étudiants dans mes cours de rédaction. La première mesure est de veiller à ce que chaque activité d’apprentissage soit intéressante. Cela ne veut pas dire que j’ai conçu auparavant des activités ennuyantes! C’est que j’ai pris conscience de l’importance de ce facteur dans la réussite des étudiants (Ryan & Deci, 2000). Concrètement, l’intérêt d’une activité d’apprentissage peut se manifester dans son caractère représentatif des contextes professionnels dans lesquels évolueront les étudiants. Par exemple, dans un cours de rédaction à de futurs professionnels de la communication, je pourrais proposer une mise en situation inspirée de mes connaissances des communications au gouvernement fédéral. Comme j’enseigne dans la région de la capitale nationale, l’activité revêtirait un intérêt supplémentaire car plusieurs de mes étudiants aspirent à une carrière au gouvernement.

En outre, il serait pertinent de proposer au moins deux versions différentes d’une mise en situation. Par exemple, je pourrais varier les sujets à traiter : environnement, fiscalité, immigration, etc. En donnant le choix à l’étudiant, on augmente les chances que l’étudiant trouve l’activité intéressante et qu’il soit motivé à l’accomplir (Parent, 2014).

La deuxième mesure concrète que je souhaite adopter consiste à provoquer davantage d’interactions en ligne, sans négliger leur qualité. Comme le suggère Bawa (2016), les interactions peuvent effectivement motiver les étudiants et, par le fait même, faire en sorte qu’ils s’engagent dans leur apprentissage. Afin d’assurer la qualité des interactions, il faut donner des indications claires aux étudiants. Que doivent-ils faire exactement? Sont-ils invités, par exemple, à poser une question sur les contenus du cours ou à fournir une appréciation sur le travail d’un autre étudiant? La qualité des interactions est également tributaire de la présence de l’enseignant. C’est donc dire que je dois donner signe de vie dans le forum, à plusieurs moments. En formulant des commentaires positifs, tout en demeurant critique, je peux assurer ma présence dans le forum et contribuer à ce que les étudiants se sentent compétents.

Comme troisième mesure, je propose de récompenser les étudiants. Mais comment récompenser des adultes? Si mon fils de 7 ans se réjouit lorsque son enseignante annonce une journée pyjama en guise de récompense du bon comportement des élèves, je ne crois pas que mes étudiants universitaires apprécieraient cette activité. Lorsque j’étudiais au baccalauréat en linguistique, l’un de mes professeurs nous donnait des questions complexes sur lesquelles travailler entre deux cours. Au début de chaque cours, il demandait à des volontaires de fournir leurs réponses. Si la réponse était bonne, le professeur accordait un point à l’étudiant. J’étais extrêmement motivée à donner de bonnes réponses, car ce professeur était des plus exigeants et je souhaitais obtenir une bonne note. Je pourrais donc copier ce professeur et accorder des points supplémentaires aux étudiants qui le méritent.

Qu’en pensez-vous? Avez-vous d’autres idées à donner à une professeure qui souhaite susciter la motivation et l’engagement de ses étudiants?

Références

Bawa, P. (2016). Retention in Online Courses: Exploring Issues and Solutions—A Literature Review. SAGE Open January-March 2016, 1–11.

Parent, S. (2014). De la motivation à l’engagement. Un processus multidimensionnel lié à la réussite de vos étudiants. Pédagogie collégiale 27(3), 13-16.

Ryan, R. M. et Deci, E. L. (2000). Intrinsic and Extrinsic Motivations: Classic Definitions and New Directions. Contemporary Educational Psychology 25, 54–67.

Le numérique au service de la participation active des étudiants

Comme professeure, je cherche toujours à améliorer mes méthodes d’enseignement. Comment rendre mes cours plus dynamiques?

Dans un cours de rédaction, l’un des premiers principes qu’on enseigne est que tout texte, pour être efficace, doit être centré sur son destinataire. Si le texte n’est pas adapté au destinataire, il risque d’être mal compris. C’est la même chose en enseignement. Pour être efficace, l’enseignement doit être centré sur les apprenants et miser sur leur participation active (Bates, 2015).

Je donne régulièrement des exercices de rédaction en classe. Chaque étudiant est devant son ordinateur et s’affaire à pondre un texte. Pendant qu’ils travaillent, je circule entre les rangées, me penche pour lire les textes et donne de la rétroaction. Que veux-tu dire par ceci? Pourquoi as-tu écrit cela? Lorsque l’information serait profitable à tous les étudiants du groupe, je les interromps et leur explique la situation. J’aime utiliser cette méthode, car elle rend l’exercice dynamique. Toutefois, je crois qu’il est temps d’actualiser la méthode. C’est décidé! La prochaine fois, j’afficherai le texte de l’étudiant à l’écran principal, afin que tous les étudiants du groupe voient l’objet de mon intervention! On n’arrête pas le progrès…

Sérieusement, voyons comment faire participer tous les étudiants dans cet exemple banal, mais tellement fréquent dans un cours de rédaction. À petite échelle, l’objet de mon intervention devient un « problème » rédactionnel. Une fois le « problème » affiché aux yeux de tous, je demanderai aux étudiants de proposer des solutions et d’appuyer leurs réponses par des principes étudiés auparavant ou par de nouvelles sources consultées. Pendant qu’ils réfléchiront, je créerai un questionnaire dans Moodle; cela ne prend qu’une minute, littéralement. Par exemple, si le problème rédactionnel est de nature structurelle, la question pourrait être : En une ou deux phrases, expliquez comment vous feriez pour améliorer la structure du paragraphe à l’écran? Au bout de quelques minutes, nous pourrions lire les réponses ensemble. Dans une classe de 30 étudiants, cela est tout à fait viable.

N’est-ce pas là un bel exemple d’utilisation du numérique favorisant la participation active des étudiants? J’ai tellement hâte au prochain exercice de rédaction!

Bates, T. (2015). Teaching in a Digital Age. https://opentextbc.ca/teachinginadigitalage/

Intégrer le multitâche dans une activité de rédaction

Les étudiants universitaires ont changé. Au baccalauréat, les étudiants «traditionnels», c’est-à-dire ceux qui sont âgés de 21 ans et moins, qui étudient à temps plein, qui préfèrent suivre leurs cours le jour et qui travaillent moins de 15 heures à l’extérieur de l’université, entre autres caractéristiques, ne représentent que 21% de la population étudiante (Pageau et Bujold, 2000). Les groupes sont donc hétérogènes. Ajoutons à cela que dans quelques années, les universités accueilleront les premiers étudiants de la génération Z, ceux qu’on appelle les digital natives. Pour certains professeurs d’université, l’adaptation à ces générations d’étudiants différents d’eux représente un défi de taille (Dyke et Deschenaux, 2008).

Les différences générationnelles pourraient s’étendre au-delà des caractéristiques sociales, des valeurs et des habitudes de vie. Dans un texte publié en 2001, Marc Prensky affirme que les digital natives seraient capables de faire plusieurs choses en même temps, contrairement aux (pauvres) immigrants numériques que sont les enseignants des générations précédentes. Je ne devrais donc pas m’offusquer du fait que certains étudiants regardent une vidéo ou envoient des textos pendant mes cours.

Mais les étudiants peuvent-ils apprendre et faire autre chose en même temps? Plusieurs recherches scientifiques iraient dans le sens contraire. Dans un article publié en 2013, la journaliste Annie Paul Murphy explique que les étudiants qui s’adonnent au multitâche pendant la réalisation d’un travail apprennent moins bien que s’ils s’étaient concentrés uniquement sur le travail en question. Les adeptes du multitâche comprendraient moins bien, se souviendraient moins des notions apprises et auraient plus de difficulté à appliquer les connaissances acquises dans de nouveaux contextes.

À chaque début de trimestre, je rappelle aux étudiants les méfaits du multitâche en contexte d’apprentissage… mais plusieurs d’entre eux n’en font qu’à leur tête. Si certains étudiants ne peuvent pas résister au multitâche, je n’ai d’autre choix que d’adapter mes activités pédagogiques. En grande primeur, voici donc une activité de rédaction où les étudiants doivent effectuer trois tâches en même temps.

Vous travaillez au bureau du Premier ministre de l’Ontario. Votre mandat de la matinée consiste à rédiger un bref discours de 300 mots, que le PM lira lors de l’inauguration de l’université francophone de l’Ontario. Au même moment, des citoyens manifestent contre la légalisation du cannabis et vous devez absolument écouter/regarder ce qui se passe dans les médias numériques, car vous aurez à rédiger un résumé de la situation cet après-midi, en vue d’un point de presse que doit faire le PM. De plus, vous êtes responsable de la formation d’une nouvelle employée et cette dernière vous envoie par courriel un texte que vous devez réviser le matin même.

Comment gèreriez-vous cette situation?

Références citées

Dyke, N et Deschenaux, F. (2008). Enquête sur le corps professoral québécois. Faits saillants et questions. Montréal : FQPPU.

Murphy, A. P. (3 mai 2013). You’ll never learn! Students can’t resist multitasking, and it’s impairing their memory. Slate Magazine.

Pageau, D. et Bujold, J. (2000). Dis-moi ce que tu veux et je te dirai jusqu’où tu iras. Les caractéristiques des étudiantes et des étudiants à la rescousse de la compréhension de la persévérance aux études. Analyse des données des enquêtes ICOPE (1er volet) : les programmes de baccalauréat. Québec : Université du Québec à Québec, Direction du recensement étudiant et de la recherche institutionnelle.

Prensky, M. (2001). Digital Natives, Digital ImmigrantsOn the Horizon, 9(5), 1-6. 

Rédiger en anglais langue seconde: quel fardeau!

Dans le cadre de mes activités de recherche, je rédige des articles en anglais. Ce n’est pas une obligation, mais cela fait connaitre mes travaux auprès d’un plus grand public. Qui plus est, les revues scientifiques en français sont en nombre relativement limité dans mon domaine.

Bien que l’anglais soit ma deuxième langue et que je le parle depuis l’âge de 16 ans, c’est pour moi un fardeau de rédiger des textes an anglais. Je cherche mes mots, je doute de la syntaxe, j’arrondis l’orthographe… De plus, rédiger un texte en anglais me prend un temps fou, je perds confiance, je procrastine. Suis-je normale, docteur?

Il semblerait que oui. Dans une étude auprès de 141 chercheurs mexicains (voit note 1), on a montré que le fardeau de rédiger des articles scientifiques en anglais langue seconde était perçu comme plus grand qu’en langue maternelle (dans ce cas-ci l’espagnol). Cette conclusion s’appuie sur les résultats d’un sondage, dans lequel on a demandé aux participants d’évaluer, sur une échelle de 1 à 7, le niveau de difficulté, d’anxiété et d’insatisfaction, d’une part pour la rédaction en espagnol et d’autre part pour la rédaction en anglais. Résultat : les chercheurs mexicains estiment que la rédaction en anglais langue seconde est plus difficile qu’en espagnol, qu’elle cause plus d’anxiété et qu’elle résulte en une plus grande insatisfaction une fois l’article terminé.

Bien entendu, ces résultats sont issus de perceptions, qui sont par définition subjectives. De plus, plusieurs autres facteurs peuvent entrer en ligne de compte, par exemple le niveau de compétence dans la langue seconde, la discipline scientifique, l’expérience, le genre de texte, etc.

Dans une autre étude (voir note 2), on a utilisé des données plus objectives. L’expérience consistait à faire rédiger des textes par des étudiants universitaires et à enregistrer toutes sortes d’informations avec le logiciel Inputlog. Les étudiants devaient produire un texte dans leur langue maternelle (le néerlandais) et un autre dans leur langue seconde (soit l’anglais, le français, l’espagnol ou l’allemand). L’analyse des résultats a révélé que les étudiants ont tapé moins de mots par minute dans leur langue seconde, qu’ils ont fait plus de pauses et que les pauses ont duré plus longtemps. Donc, ces rédacteurs ont été moins productifs dans leur langue seconde! Voilà qui me réconforte; cette conclusion correspond tout à fait à mon impression de ma productivité en anglais.

Mais, si des personnes perçoivent la rédaction en anglais langue seconde comme un plus grand fardeau qu’en langue maternelle, cela signifie-t-il pour autant qu’elles soient moins productives dans cette langue? Afin de vérifier cette hypothèse, il faudrait combiner les deux méthodes décrites dans ce billet, à savoir enregistrer des informations objectives pendant que des rédacteurs créent un texte en anglais langue seconde, puis recueillir leurs états d’âme dans un questionnaire, idéalement avant et après l’expérience. N’est-ce pas là une belle idée de recherche appliquée en rédactologie? Ah… Si j’avais le temps de faire un deuxième doctorat…

Références

1. David I. Hanauer et Karen Englander (2011). Quantifying the Burden of Writing Research Articles in a Second Language: Data From Mexican Scientists, Written Communication, 28(4), p. 403–416.

2. Luuk Van Waes et Mariëlle Leijten (2015). Fluency in Writing: A Multidimensional Perspective on Writing Fluency Applied to L1 and L2, Computers and Composition, 38, p. 79-95.

© Marie-Josée Goulet

Au-delà du Français au bureau

Vous ne comprenez rien aux travaux que rédigent vos compagnons de classe? Vous en avez marre de récrire les textes de vos collègues de travail? Offrez-leur un manuel de rédaction! Mais attention, pas n’importe lequel. Voici cinq titres qui m’apparaissent complémentaires.

  1. Guide du savoir-écrire, de Jean-Paul Simard, publié en 2005 aux Éditions de l’Homme.

Si un manuel de rédaction peut être mythique, pour moi c’est celui-là. Quand j’étais petite, nous avions à la maison la première édition qui remonte à 1984. Ce manuel décrit plusieurs genres issus des domaines administratif, journalistique et scientifique. Il présente également des techniques de base pour « bien » écrire, en plus de fournir de nombreuses recommandations sur le style. C’est à mon avis l’un des plus complets.

  1. Guide raisonné de rédaction. De l’idée au texte, de Daniel Samson-Legault, publié en 2012 aux Éditions MultiMondes.

Comme son titre l’indique, ce manuel présente la rédaction comme une démarche dont le point de départ est une idée. La rédaction serait-elle donc une activité de conception? (Note: J’emprunte cette idée à mon collègue et ami Éric Kavanagh, professeur à l’École de design à l’Université Laval.) Contrairement au Guide du savoir-écrire, le Guide raisonné de rédaction ne présente pas de « recettes » pour bien écrire, ni de recommandations stylistiques, mais couvre une diversité de genres, dont plusieurs sont journalistiques (communiqué, entrevue, billet, reportage, éditorial, etc.).

  1. De la lettre à la page web, d’Isabelle Clerc et Éric Kavanagh, publié en 2006 aux Publications du Québec.

Ce manuel aborde la rédaction dans la perspective des communications entre le gouvernement et les citoyens. Après avoir présenté la démarche de rédaction, les auteurs se concentrent sur cinq genres administratifs : la lettre, le courriel, le formulaire papier, le formulaire électronique et le site web (ce dernier point est d’ailleurs un avantage majeur en comparaison avec les autres ouvrages). En bref, De la lettre à la page web est un incontournable pour les rédacteurs du service public!

  1. Le français scientifique : guide de rédaction et de vulgarisation, de Jacques Leclerc, publié en 1999 aux Éditions Linguatech.

Ce manuel décrit quelques genres scientifiques (article, synthèse, etc.) et aborde les deux qualités essentielles de l’article scientifique, à savoir l’objectivité et la précision. On y consacre en outre tout un chapitre sur l’argumentation, en plus d’aborder la vulgarisation et le lexique scientifique. C’est l’un des ouvrages que j’ai utilisés pour créer le cours Rédaction technique et scientifique à l’UQO.

  1. La profession de rédacteur, de Jean Dumas, publié en 2009 aux Éditions Fides.

Ce livre n’est pas un manuel de rédaction à proprement parler, mais plutôt un essai sur la profession de rédacteur. Quelles qualités doit-il posséder? Quels défis l’attendent sur le marché du travail? Comment choisir entre le travail autonome ou salarié? Très utile pour les personnes qui commencent des études en rédaction et pour celles qui envisagent de démarrer leur entreprise de rédaction.

En conclusion, on me demande souvent si je recommande Le français au bureau. Eh bien, s’il ne figure pas dans cette liste, c’est parce que je ne le considère pas comme un manuel de rédaction…

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