Technologies de rédaction : que nous réserve le futur?

On oublie parfois que les technologies de rédaction ne datent pas d’hier. Selon Brian Gabrial, professeur de journalisme à l’Université Concordia, on peut les classer dans quatre catégories.

  • Technologies manuelles : tablette (d’argile), doigt (humain), papyrus, roseau, plume, crayon, papier, etc.
  • Technologies mécaniques : presse de Gutenberg et machine à écrire.
  • Technologies électriques : télégraphe et télécopieur.
  • Technologies électroniques : ordinateur, traitement de texte, internet, etc.

Nous en sommes donc à l’ère électronique des technologies de rédaction. Que nous réserve le futur? Dans le cadre d’un sondage pancanadien sur les outils informatiques (voir note), j’ai posé la question à plus de 400 rédacteurs professionnels. Il en ressort les points suivants.

Selon les rédacteurs canadiens, les logiciels de reconnaissance vocale seront de plus en plus performants et pourraient même remplacer les claviers. De quoi réjouir les personnes qui souffrent de tendinites! Je me demande toutefois comment nous pourrons concilier ce mode de rédaction et le partage des espaces de travail…

Par ailleurs, les rédacteurs canadiens croient que la rédaction s’effectuera de plus en plus de manière collaborative. Dans certains milieux de travail, la rédaction s’effectue depuis longtemps en collaboration, mais il faut admettre que les nouvelles technologies facilitent la collaboration. Pour ne donner qu’un exemple, Google Drive permet à plusieurs personnes de travailler sur un texte en même temps, ce qu’on appelle la rédaction collaborative synchrone.

De plus, les rédacteurs canadiens ont formulé des demandes précises envers l’industrie langagière. Premièrement, ils ont souligné la nécessité de mettre l’accent sur la convivialité des outils. S’il est raisonnable de penser qu’une entreprise évalue son outil avant de le commercialiser, on peut aussi supposer que la plupart le font individuellement, indépendamment des autres outils qu’utilisent les rédacteurs. J’ai d’ailleurs déjà abordé la question de l’intégration des outils dans un billet précédent. Enfin, les rédacteurs ont mentionné qu’ils avaient besoin de formation sur les outils informatiques, non seulement pour les nouveaux outils à venir, mais également pour ceux qu’ils utilisent déjà.

Je parie que nous aurons le sourire aux lèvres lorsque nous relirons ce billet dans quelques années. Certaines choses se seront probablement améliorées, mais d’autres n’auront pas changé. Quelles sont vos prédictions? Quelle sera la prochaine technologie de rédaction?

Référence citée: Gabrial, Brian (2008). « History of Writing Technologies », In Handbook of Research on Writing: History, Society, School, Individual Text, sous la dir. de Charles Bazerman, p. 23-33. New York: Lawrence Erlbaum Associates.

Note: Ce document n’est disponible qu’en anglais.

© Marie-Josée Goulet

Rédaction numérique, électronique ou web?

Vous avez sans doute remarqué que plusieurs expressions sont utilisées pour désigner la rédaction effectuée avec les technologies : rédaction électronique, rédaction numérique, rédaction 2.0, rédaction web, rédaction en ligne, etc. Ces expressions sont-elles synonymes? En quoi se distinguent-elles? Bref, comment s’y retrouver?

J’ai analysé cette question dans un article scientifique rédigé conjointement avec Laurence Pelletier, candidate à la maitrise en études langagières. Partons de ce schéma (il faut vraiment le lire pour comprendre la suite).

Types de rédaction numérique

Types de rédaction numérique

Nous avons dans un premier temps dressé la liste des formes particulières de rédaction (à gauche dans le schéma). Cette liste n’est pas exhaustive. Elle est issue d’une analyse des plus récentes définitions proposées en rédactologie et pourra certainement être bonifiée au fil de nos recherches.

Dans un deuxième temps, nous avons regroupé les types apparentés de rédaction. C’est ainsi que nous en sommes venues à la distinction rédaction électronique / rédaction web. Puis, il fallait choisir une expression générique qui engloberait ces deux catégories intermédiaires. Notre choix s’est arrêté sur rédaction numérique, qui est la traduction de digital writing, une expression consacrée en anglais.

Ce schéma est loin d’être parfait. Les plus futés d’entre vous aurez remarqué que les catégories ne sont pas exclusives. Par exemple, en ce moment, j’utilise un outil en ligne pour rédiger un billet de blogue qui sera publié sur le web. Je fais donc à la fois de la rédaction électronique et de la rédaction web. De plus, le schéma pourrait inclure au moins un autre niveau. Par exemple, la rédaction pour les sites web pourrait se décliner en autant de types de sites qu’il existe (informationnels, commerciaux, personnels, etc.).

Notre analyse, bien que modeste, constitue une contribution originale à la définition des nouveaux types de rédaction engendrés par le numérique. En rédactologie, comme dans n’importe quelle autre discipline scientifique, nous avons besoin d’utiliser des expressions précises afin de désigner des concepts distinctifs. Mais dans la vie de tous les jours, ne pourrait-on pas se passer de ces qualificatifs? Si la rédaction est toujours numérique, et je ne considère pas ici la liste d’épicerie griffonnée sur un bout de papier, l’expression rédaction numérique n’est-elle pas un pléonasme? Et si l’on réservait le terme rédaction pour la rédaction numérique, devrait-on utiliser une expression spécifique pour la rédaction non numérique? Rédaction traditionnelle? Ancienne? Archaïque? Anumérique?

© Marie-Josée Goulet