Dans le film The Matrix, Neo apprend le kung-fu en quelques secondes grâce à un programme téléchargé dans son cerveau. Contrairement à ce qui se passe dans cette scène, l’apprentissage n’est pas quelque chose que l’on peut faire aux étudiants. L’apprentissage est quelque chose que les étudiants font (Ambrose et al., 2010). Dans la vraie vie, on ne peut pas apprendre le kung-fu en absorbant passivement des connaissances provenant de sources externes et ce raisonnement s’applique à tous les types de connaissances, dans tous les domaines. L’apprentissage est du ressort des étudiants et les enseignants sont là pour aider les étudiants à apprendre.
Mes récentes lectures sur la pédagogie universitaire me font tourner la tête tant je découvre d’ajustements à opérer dans la planification de mes cours. Je vous en révèle deux dans ce billet.
Premièrement, au moment de préparer une séance de cours, il faut veiller systématiquement à l’alignement pédagogique, un principe introduit par Biggs en 1996. Selon le principe d’alignement pédagogique, les objectifs d’apprentissage formulés par l’enseignante doivent être cohérents avec les activités pédagogiques proposées aux étudiants, de même qu’avec les stratégies d’évaluation mises en place. Dans mon cours de Rédaction technique et scientifique, par exemple, les étudiants doivent apprendre comment vulgariser un texte scientifique pour le grand public. Ainsi, si je souhaite évaluer un texte de vulgarisation rédigé par les étudiants, il faut absolument que les étudiants aient effectué cette activité auparavant.
C’est presque trop simple. Et pourtant, je ne mettrais pas ma main au feu que tous mes cours sont bien alignés sur le plan pédagogique. Dans l’exemple précédent, une enseignante moins expérimentée pourrait être tentée de concevoir une activité où les étudiants doivent observer des textes vulgarisés et en déduire des procédés de vulgarisation, mais omettre (par manque de temps peut-être) d’inclure une activité de rédaction. Il me semble que j’ai déjà vu ça quelque part…
Le deuxième ajustement que je souhaite effectuer dans la planification de mes cours est d’intégrer des activités permettant aux étudiants de prendre conscience de leurs stratégies d’apprentissage. Selon Ambrose et al. (2010), les étudiants universitaires doivent effectivement apprendre à gérer et à adapter leurs stratégies d’apprentissage. Combien de fois ai-je fourni à mes étudiants une liste d’étapes les guidant dans la réalisation d’une activité? Dans le futur, il serait préférable que je demande aux étudiants de dresser eux-mêmes la liste des étapes. De cette manière, ils planifieront eux-mêmes la réalisation de l’activité, ce qui leur permettra d’anticiper les connaissances nécessaires à la réalisation de la tâche (Bégin, 2008).
Revenons maintenant à Neo. Après son apprentissage quasi instantané du kung-fu, Neo démontre ses prouesses, mais il n’arrive pas à battre le maitre. Ce dernier le questionne alors sur les raisons de cet échec, ce qui amène Neo à activer ses stratégies métacognitives d’autorégulation. En s’auto-observant et en s’ajustant, Neo fait preuve d’apprentissage en profondeur, le type d’apprentissage qui permet de réellement comprendre quelque chose. Sans cet apprentissage en profondeur, Neo n’aurait jamais vaincu la matrice…
Ambrose, S. A., Bridges, M. W., DiPietro, M., Lovett, M. C., Norman, M. K. (2010). How learning works. Seven researched-based principles for smart teaching. San Francisco: Jossey-Bass.
Bégin, C. (2008). Les stratégies d’apprentissage: un cadre de référence simplifié. Revue des sciences de l’éducation, 34(1), 47–67.